Carnet de voyage 2008-2009
Départ de Barcelonne versTanger au Maroc par le ferry le 14 décembre 2008
Pays visités : Maroc - Mauritanie - Mali - Burkina Faso - Bénin - Togo et retour - Durée 3 mois 1/2

 


Dimanche 30 novembre 2008
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J’ai toujours pensé que les préparatifs d’un voyage suivent déjà le départ et mon imagination est en chemin. La tête voyage, chaque objet sélectionné pour partir sont des compagnons. Chaque objet emporté mis en un point précis de la voiture déclenche une pensée, une situation vivante, une manière de s’installer dans la route.


En début de cette année, lors du même périple, j’étais dans la technique du voyage, je ne savais pas ce qui m’attendait c’était mon premier départ aussi long. Je me concentrais,
sans autre repère, sur l’équipement du Defender .

Aujourd’hui je sais ou je vais, certaines personnes m’attendent, j’ai des engagements à tenir, des contacts à reprendre, de nouveaux à construire. Mais partir de cette manière est une expérience forte, il me faudra huit à dix jours pour arriver à Bamako, ville mythique, immense de poussière et d’odeurs. Huit à dix jours pour arriver à Noël. Cette ville, un mouvement continuel des sens, un tourbillon incessant coupé par le fleuve Niger, ce grand calme qui rappelle inlassablement que le temps est présent. Il coule à l’envers et remonte dans les terres. Il est là pour permettre un rattachement au silence. Ce sera ma première étape forte, ce qui précèdera me permettra juste de décrocher de la France qui m’inquiète. En voiture je découvre avec bonheur ce qu’est une arrivée en douceur sur ce continent si différent. L’avion vous projette, sans ménagement, en un instant dans cette autre vie. C’est une introduction lente à la découverte.
Je reviendrai ici avant mon départ...

Mercredi 10 décembre 2008, pourquoi partir ?
(...) Pas facile d'écrire quand on est aussi près d'un départ. Que veut dire départ ? On part quand on a terminé quelque chose, quand on va vers une nouvelle destination un nouveau choix, après une déception, quand on aime aussi. A toutes ces situations sont accrochées l'idée de mouvement et chacun peut s'y retrouver ou pas dans un départ. Être immobile c’est mourir pour moi. Quoique nous fassions il faut bouger, accrocher du mouvement au jours qui s’étirent. L'idée de découverte et d'effacement sont présentent souvent dans le désir de partir. Idées complémentaires mais contradictoires. Aujourd'hui « départ » n'a jamais été aussi synonyme de la recherche de "nouveau" ou de "changement". Partir c'est mourir un peu dit-on mais pourquoi ? Doit-on laisser un peu de notre vie en partant ? J'ai l'impression moi d'emporter tout aujourd'hui, de ne rien laisser pour pouvoir faire le tri, pour enfin chercher à vivre au contraire. Je pars trouver pour une vie plus simple, plus proche des valeurs qui sont enfouies. Je n’ai pas l’impression de regretter quoique ce soit. J'ai le désir de vouloir ressembler plus à ce que je suis c'est ça qui me donne la force tous les jours d'organiser et de choisir ma vie. Je rêve parfois d’une route avec des carrefours ou il y a des dangers qui arrivent de partout, je le cris souvent pour interpeller et à l’approche ce carrefour il y aura des bonheurs aussi si je choisis de le rencontrer. Je pars car trop de lois m’imposent ses choix, trop de tâches journalières me sont dictées par des courriers, des informations, des journaux, des images. Ces images que j’aime tant car elles expriment ce que je pense donc ce que je suis. J’aime une image car elle me ressemble. J’ai le désir de remettre ma vie à plat dans ce climat ou tout s’oriente vers l’imposition de sa pensée aux autres sous ce couvert de vouloir mieux vivre. Vais-je mieux vivre si on m’enlève la liberté de m’arrêter là ou il faut circuler, de travailler quand arrive le jour de se reposer, de me reposer quand c’est normal de faire pour gagner ? Gagner quoi ? La liberté de ne plus voir ? (...)
A bientôt, la prochaine fois je serai en route...

Mardi 3 mars 2009 Déjà... Je suis au Mali
Je me demande pourquoi le temps passe à cette allure.

Pourquoi jamais sa vitesse n’est la même. Depuis que je suis parti je n’ai pas encore donné de mes nouvelles sur ce carnet de voyage. J’en avais le désir mais peut-être pas l’envie. L’isolement en tous points de mon lieu de départ me parait normal et m‘est nécessaire. Je me consacre qu‘à la découvertes de contrées et des gens que je ne connais pas. Rendre compte régulièrement c’est un espace de liberté qui s’en va, plutôt une contrainte qu’il faudrait que je m’impose et je n’en ai pas le désir et puis j‘en suis incapable non plus. Dire régulièrement je suis là et j‘ai fais ça et ça m‘est impossible et deviendrait vite une épreuve que je ne veux pas m‘imposer.

Ne pas chercher à préparer le lendemain m’est agréable. Je sais, c’est très africain aussi et j‘adopte volontiers cette formule. J’ai besoin de cette totale liberté, de ne pas chercher à savoir de ce que demain sera fait. La période de plus de deux mois qui s’est déjà écoulée depuis mon départ a été par moments, qu’ils soient bons ou mauvais d’ailleurs peu importe, très brève.

J’appréhende un peu l’arrivé chez moi, le déballage, les traces de poussière de latérite sur tout ce qui est dans la voiture, la circulation, le courrier inutile auquel il faut répondre, les factures à la con, les climats journaliers changeants car ici il fait toujours beau même si à Bandiagara il a plu en février ce qui ne se voit presque jamais en cette saison.

L’obligatoire prise de conscience que je dois rentrer freine mon obligation de le faire. Suis-je obligé ? Un jour je répondrai non.

Heureusement que je vais devoir préparer le prochain départ en silence, classer mes images et en faire les montages, les revoir et les revoir encore, reprendre mes textes et les corriger pour qu’ils soient des documents sonores de qualité, comme ça je serais encore sur la route.

Bon je me lance un peu dans les informations que j’aurais dû écrire ici depuis longtemps mais vraiment que dans ses grandes lignes. Le détail je vous le raconterai en vous montrant les images.

Le Maroc en décembre 08 un vrai frigo humide, j’encaisse rhumes sur rhumes, la descente du sud marocain; comme d’habitude lancinante mais une belle période préparatoire à l’Afrique noire, Bamako le 25 décembre et jour de l’an deux fêtes ratées mais je devais en attendre trop, ensuite Mali, Burkina Faso, Bénin; partie agréable ponctuée de nombreuses et belles rencontres ou découvertes. Togo; Bof je passe presque sans m’arrêter un peu déçu, pas grave ce doit être un beau pays mais rien n’a été palpitant pour moi, mais ça n‘a été que trois ou quatre jours. Question de chance aussi. Burkina de nouveau; rencontre avec de jeunes français sans intérêt et intervention médiocre de leur part, je repars vite vers l’est du Burkina que je ne connais pas, coté Dori et Bani ce village au sept mosquées. L’harmattan s’en mêle et je fais avec. Gorom-gorom je passe. Découvertes des paysages du Sahel très durs et puis j’arrive au pays Dogon par Koro et Bankass pour la deuxième fois. Grâce Souleymane mon guide de l’an passé ce fut encore une formidable découverte et je termine la falaise seule surune magnifique piste vers Gao pour respirer la chaleur et la sécheresse d‘une nouvelle partie du Mali que je ne connaissais pas encore.. Tombouctou par la piste, humm pas possible seul, trop d’insécurité et je ne suis pas là pour chercher les galères, après trois jours dans la ville je retourne sur Ségou cette ville que j’affectionne particulièrement. Et depuis 8 jours j’y suis, je passe de rencontre en rencontre avec Seydou.

Demain Markala pour le festival des marionnettes d’eau. Des couleurs et du mouvement en perspective a saisir en pixels. J’attends pour voir j’espère y attraper de belles images et de belles histoires. Seydou ce garçon attachant rencontré aussi l’an passé m’y accompagne. Il connaît tout le monde, c’est un bon compagnon pour moi. Il m’écoute.

Allez je file, bye bye… Suite bientôt ou à mon retour en France

Mercredi 8 mars 2009 hélas... (...) Je suis rentré depuis 8 jours...

Je me demande ce que je fais ici...

Courrier, froid, pluie, tout me rebute. Seul désir; laver la voiture et repartir, poursuivre ce voyage dans lequel j’étais comme dans un fauteuil et continuer d’être libre de mes gestes. Le lieu où je suis me plante à un endroit sans pouvoir en bouger. Mes racines sont ailleurs, sur quatre roues ? Problème je ne sais pas où. Ici où j’habite, j’ai trop de choses à faire pour le maintenir la maison en vie, je m‘y sens à l‘hôtel; à peine arrivé, prêt à en repartir. Une vie qui ne m’est plus nécessaire mais personne ne me comprend, tant il est agréable. C’est maintenant un poids. L'idée sournoise de le vendre pour retrouver un nouvel espace de liberté et d‘entreprendre me traverse souvent l'esprit.

Un ou deux aller et retour dans différents coin de France et dans peu de temps je serai prêt à filer ne sais où lorsque le printemps sera bien présent. Au Mali d'abord, certainement en avion, pour y faire un reportage, mais pourquoi pas en Cappadoce ou en Roumanie avec la voiture ? Ce n’est pas bien loin. Au Mali au mois de mai il y fera très chaud, mais le fleuve devrait tempérer ça et puis c‘est quinze jours, je ne les verrai pas passer.

En attendant je vais travailler sur mes photos et film pour construire quelque chose avec la matière récoltée, un montage et aussi compléter ce site avec des traces nouvelles qui cette fois seront bien différentes des précédentes. Je regarde l’Afrique différemment aujourd’hui, une sorte de grande banlieue où il est facile de s’y rendre. Des marchés où je regarde moins les gens que les denrées qu’il me faut. Un sorte d’accoutumance à une culture. 25000 km ce n’est pas la mer à boire. Derrière il y a l’Amérique Latine pour la fin de cette année ce sera 35 ou 40000km cette fois-ci. Ce sera une autre affaire et comme une vieille idée qui revient me voir (...)

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